Orlane MAMMAR – Contrôle actif de cordes de piano utilisant des transducteurs électromagnétiques
Afin de conclure ses années d’étude d’ingénieure à l’ESTP en spécialité Génie Mécanique et Electrique, Orlane Mammar réalise actuellement son stage de master à l’IRCAM au sein de l’équipe S3AM du laboratoire STMS. La recherche menée est en collaboration avec l’Institut National du Patrimoine et l’Université de Limoges, et porte sur l’étude de la fatigue du bois sous sollicitations vibratoires.
En parallèle de sa formation scientifique, Orlane est une pianiste et chanteuse formée par le conservatoire qui s’intéresse maintenant à la composition et à la musique assistée par ordinateur.
En octobre 2025, Orlane Mammar débutera sa thèse au sein du Collegium Musicæ.

Contexte
Ce projet de recherche doctoral vise à créer une solution intelligente pour étendre et contrôler les caractéristiques vibratoires et acoustiques du piano. Son impact sur la facture instrumentale contemporaine, la création et l’interprétation musicale, s’étend au domaine du contrôle non linéaire de structures dynamiques complexes.
Le projet d’un piano augmenté à l’aide de transducteurs électromagnétiques est né de la collaboration en 2005 de Per Bloland, compositeur, et d’Andrew McPherson, chercheur, à Stanford University. Les transducteurs sont fixés à une barre de maintien et positionnés au-dessus des chœurs de cordes : en conséquence de l’envoi d’un signal électrique, le champ magnétique rayonné par ces transducteurs entraine la mise en vibration des cordes. Les deux collaborateurs expérimenteront notamment l’envoi de plusieurs signaux sonores de synthèse, de voix et de percussions sur des chœurs de cordes via le logiciel Max MSP. Une telle méthode permet la production de nouveaux sons rayonnés par le piano, mais ne permet pas encore une réelle interaction entre le pianiste et le dispositif. Le projet a ensuite été prolongé lors de 2 résidences musicale menées à l’Ircam :
L’une (2013), en collaboration avec Joël Bensoam, a mené à un premier modèle physique de transducteur électromagnétique,
L’autre (2023-2024), en collaboration avec Henri Boutin, a permis de réaliser les premiers essais de contrôle actif sur un grand piano (Steinway D)
En parallèle, depuis les années 90, l’idée de contrôle actif visant à amplifier le son et non plus à l’atténuer se forme. Ainsi, Per Bloland rejoint les autres co-encadrants de ce projet de recherche dans un souhait commun de concevoir un piano contrôlé activement par des transducteurs électromagnétiques. Le contrôle actif permet d'attribuer des caractéristiques temporelles et fréquentielles souhaitées aux structures vibrantes. Appliquée aux instruments de musique, cette technique leur permet ainsi de produire et rayonner des sons inédits pour un piano acoustique, contrairement aux effets sonores appliqués aux enregistrements, généralement diffusés par des haut-parleurs.

Projet de thèse
Dans ce projet de recherche doctorale, nous souhaitons appliquer le contrôle à un système complexe, composé de cordes de piano couplées entre elles et à la table d'harmonie. Il repose sur une compréhension détaillée des principes du contrôle non linéaire, et sur sa validation par des modèles physiques.
Nous proposons de placer un contrôleur dans une boucle de rétroaction, qui prend comme entrée la mesure de vibration des cordes, et calcule le signal de force à leur appliquer en temps réel afin de leur imposer la vibration souhaitée. Les rôles d’actionneur et de capteur seront joués par des transducteurs électromagnétiques composé d’une combinaison d’électro des électroaimants.
La thèse commencera par la création d’un transducteur optimisé pour le contrôle actif colocalisé, composé d’une combinaison d’électroaimants et d’aimants permanents servant à la fois de capteur et d’actionneur. Au cours de cette étape, nous modéliserons :
- le champs magnétique rayonné par le transducteur électromagnétique
- la vibration d’un système composé de 3 cordes vibrantes couplées à un même chevalet et frappée par un même marteau
- les phénomènes d’interactions électromagnétiques, principale source de non-linéarités
Pour cela, nous utiliserons le formalisme des Systèmes Hamiltoniens à Ports adapté au caractère multiphysique (mécanique / magnétique / acoustique) du système considéré. Il permettra de garantir la passivité de notre système pour la modélisation et la simulation.
En parallèle, il sera primordial de définir avec Per Bloland et les compositeurs intéressés des effets sonores fréquentiels ou temporels présentant un intérêt pour la création musicale contemporaine. Ce travail compositionnel aura pour but d’orienter la conception des lois de contrôle actif non linéaires.
Nous simulerons ensuite les lois de contrôle à partir des modèles non linéaires de cordes et de transducteurs obtenus, puis nous réaliserons le montage de notre dispositif expérimental sur un piano à ½ queue.
Enfin, la création d’une interface permettant à l’interprète de jouer simultanément sur le piano de manière traditionnelle, avec le clavier, et sur le son rayonné grâce à la solution de contrôle actif est essentielle. Pour cela, nous concevrons un mapping entre les caractéristiques sonores ciblées par les compositeurs et les coefficients de contrôle actif, puis nous développerons une interface ergonomique adaptée au geste expressif de l’interprète (pédale, slider, …)
Laboratoires d’accueil
Cette thèse est accueillie par :
L’équipe S3AM du laboratoire STMS (UMR9912), le centre de robotique de l’Institut des Transformations Numériques des Mines Paris-PSL et le Department Of Music de la Miami University située aux Etats-Unis.
Elle sera co-dirigée par David Roze et Henri Boutin, chercheurs, à l’Ircam, et co-encadrée par Brigitte d’Andréa-Novel, chercheuse et professeure à Mines Paris-PSL, et Per Bloland, compositeur de la Miami University.